<234>à une puissance redoutable, dans un temps où l'on devait s'y attendre le moins. L'Europe est frappée de la témérité de cette entreprise; la bataille de Mollwitz, des villes rendues, en font entrevoir la réussite. Il n'est aucune puissance qui ne travaille à mettre dans son parti le jeune vainqueur de la Silésie. La France réussit à le gagner, et se croit à l'abri de tout sous les auspices heureux de cette alliance. L'électeur de Bavière est placé sur le trône impérial, et obtient la couronne de Bohême par la valeur des troupes prussiennes et par la négociation de la France. Les Autrichiens semblent, par un coup heureux, mais imprévu, de la Providence, se relever de leur chute. Le roi de Prusse, jaloux de cette espèce de gloire, les remet, par une victoire nouvelle, dans l'état d'abaissement. Ses conquêtes, que le temps multipliait, ses succès heureux, demandaient, pour être affermis et confirmés, d'abandonner des alliés dont les démarches sourdes indiquaient des desseins peu favorables à la gloire de la maison de Prusse; on abandonne incontinent ces alliés, sans craindre leur puissance, qu'on affaiblit par là, et dont on dérange tout d'un coup les desseins. Ce tableau, que mon imagination peint mieux que ma plume, se présente toujours à mon esprit; je ne puis le perdre de vue.

Harpera a été invité par l'impératrice de Russie à venir à Moscou; Chétardie lui a écrit sur ce sujet une lettre que j'ai vue. Knobelsdorff l'a détourné de ce dessein.

Le maître des balletsb est arrivé avec la danseuse Roland et quelques autres. On travaille à force à Charlottenbourg, où je fus dernièrement. J'y trouvai des architectes qui venaient de Dresde pour s'y former le goût. Cela flattait ma vanité, je ne sais pourquoi.

J'ai l'honneur d'être, etc.


a Jean Harper, peintre suédois, né à Stockholm en 1688, vint à Berlin en 1712, fut nommé peintre de la cour en 1716, et mourut à Potsdam en 1746.

b Poitier. Voyez t. XV, p. 219 et 220.