19. AU MÊME.

Rheinsberg, 7 février 1738.



Mon cher Camas,

Je vous fais mille remercîments des fromages, des poires, et de tout ce qu'il vous a plu de m'envoyer. Votre souvenir m'est plus cher que tous les trésors qu'on pourrait me donner, et quand même vos lettres ne seraient accompagnées que d'un brin de paille, cette paille même me ferait plaisir en venant de vous. Ne croyez pas que j'apprécie les marques d'amitié selon leur valeur ou selon leur poids d'or; bien loin de là, je puis vous assurer que jamais l'amour de la pauvreté ne fut à un si haut degré chez les Romains que chez moi. Marque de cela, je n'ai pas un sou dans toute la maison, ni dans mon pouvoir.

Je m'occupe à présent avec les plans que le prince159-a m'a <147>envoyés; il y en a seize; ils ont chacun dix pieds de haut, et six en largeur, de façon qu'on ne peut commodément les communiquer. La description en est très-claire et intelligible, la méthode nouvelle, et la conduite méthodique. Il y a deux choses qu'on pourrait critiquer, autant que je l'entends, mais que je ne saurais vous dire sans plan.159-b

Voyez-vous, à la droite, il n'y a point de pont de communication avec les bataillons du siége; et en second lieu, ces bataillons n'ont aucune ligne qui puisse les couvrir contre les insultes de l'ennemi. Je vous prie, mandez-moi ingénument votre avis, et croyez-moi toujours avec une très-parfaite estime.



Mon cher Camas,

Votre très-fidèlement affectionné ami,
Federic.


159-a Le prince Léopold d'Anhalt-Dessau.

159-b Nous donnons ici le fac-simile de l'autographe de ce plan.