<81>que j'y serais transporté vivant. Adieu, mon très-cher ami; je trouve tous les jours davantage que le monde est une drôle de chose, et que la grâce des grands est la chose du monde la plus variable. Un faux rapport, un rien, sont capables de détruire tous les services et toute l'application que l'on prend à s'insinuer auprès d'eux. Je chéris ma retraite, et je bénis le sort qui m'éloigne de la goutte, du monde de Berlin, et de toute cette clique dont la fausseté est la mère et dont la jalousie est le guide. Et ce que je crois, c'est que l'on a fait accroire au Roi que je voulais empiéter sur son autorité, et Dieu sait que l'on me fait grand tort, car une vie tranquille et paisible m'est beaucoup plus agréable que d'être chargé du poids des affaires. Je lui souhaite une longue vie, et je vous assure qu'en cela je dirai toujours comme feu le Dauphin, qui expliqua une fois dans le conseil les sentiments qu'il avait envers le grand Louis, son père. « Je souhaite, disait-il, que je puisse toujours l'appeler le Roi mon père, » ce digne fils voulant marquer par là que la vie de son auguste père lui était plus à cœur que la gloire du trône. Je finis, mon cher ami, ma lettre et mes réflexions, en vous assurant que l'amitié et l'estime que j'ai pour vous ne finiront qu'avec ma vie, étant avec une particulière considération et un sincère attachement, etc.

Frederic.

Je suis ravi de la bonne nouvelle que vous me mandez touchant une certaine personne de Vienne.

34. AU MÊME.

Ruppin, 8 mars 1733.



Mon très-cher ami,

Je vous rends mille grâces de la vôtre, et j'avoue que j'ai été fort surpris touchant ce que vous me dites du lieutenant-colonel Bredow. C'est la première nouvelle que j'en apprends, et j'avoue que je ne connais ni de vue ni d'aucune façon cet honnête homme-