<406>leur pension de trois cents écus jusqu'à ce qu'ils fussent parvenus au grade de capitaine. Frédéric ne s'intéressa pas moins à rétablissement de la fille de son ami, qui épousa, le 22 décembre 1750, le lieutenant-colonel de Keith,a après avoir joui de sa pension jusqu'à son mariage. Quant à mademoiselle Hedwige de Suhm, elle vécut près de trente-trois ans à Berlin, et eut jusqu'à la fin de sa vie la pension qui lui avait été accordée, et bien d'autres précieux témoignages de la bienveillance et des bonnes grâces du Roi.

L'aîné des fils, le lieutenant Ernest-Ulric-Pierre de Suhm, eut une jambe emportée par un boulet de canon à la bataille de Prague. Frédéric lui donna, au mois d'avril 1759, la place de maître des postes à Dessau, ainsi que le titre de conseiller de guerre. C'est dans sa soixante-deuxième année que M. E.-U.-P. de Suhm écrivit la lettre suivante au Roi.

Dessau, 12 mai 1785.



Sire,

Sentant approcher la fin de ma vie, je viens me jeter aux pieds de Votre Majesté pour lui demander une dernière grâce. Daignez écouter favorablement la prière que j'ose d'une voix faible élever jusqu'à vous. Les trois fils dont le ciel m'a béni sont entrés successivement depuis deux ans dans le service de V. M. Ils sont encore porte-enseigne, l'aîné dans le régiment d'Erlach, le second dans le régiment de Below, et le troisième encore surnuméraire dans le régiment du défunt prince Léopold de Brunswic. Avant que de détacher mon cœur des liens paternels, je viens m'acquitter des derniers devoirs que la nature m'imposa envers eux, je viens implorer vos bontés pour eux. Ah! laissez votre grande âme s'attendrir à la prière d'un père mourant et encore inquiet sur leur sort. Laissez-moi emporter au tombeau la douce consolation d'avoir contribué à leur bonheur jusqu'à mon dernier soupir. Daignez, grand monarque, vous souvenir d'eux dans l'occasion. Favorisez-les autant que la justice, conciliée avec votre bonté royale, pourra le permettre. Daignez les recommander à leurs supérieurs, afin que ceux-ci les exhortent à marcher dans le chemin de l'honneur et de la vertu. Enfin, si le souvenir d'un nom qui jadis vous fut cher peut être une excuse pour tant de hardiesse,


a A la prière du feld-maréchal Keith, Frédéric donna, le 10 octobre 1750, au lieutenant-colonel de Keith, son aide de camp, la permission de se marier avec mademoiselle Marguerite-Albertine-Conradine de Suhm.