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40. A M. DE SUHM.

Berlin, 10 décembre 1736.



Mon cher Diaphane,

Je viens de recevoir votre lettre, avec le paquet, dans le moment où je m'attendais à vous voir vous-même; et, quoique j'en aie été dédommagé par une très-jolie lettre, je vous avoue que votre présence m'aurait été infiniment plus agréable. Je suis persuadé qu'un philosophe comme vous ne fait rien sans raison; je crois même que votre voyage de Russie a sa raison suffisante. Mais, indépendamment de tout cela, permettez-moi de vous dire que votre départ me fait beaucoup de peine, et que je sens bien que la voix de la raison n'a guère de vertu sur un cœur pénétré d'amitié. Alléguez-moi cent mille raisons qui vous ont obligé de vous faire envoyé, mon amitié dira toujours que vous avez tort.

Vous me flattez encore, mon cher Diaphane, du plaisir de vous revoir ici. Je le souhaite beaucoup, et principalement pour vous faire ressouvenir de ce que vous m'avez promis un jour. Je vous prie, ne l'oubliez de votre vie, et soyez persuadé que, dans quelque endroit du monde que vous vous trouviez, je m'intéresserai toujours vivement à ce qui vous regarde, mon cœur prendra toujours part à votre gloire, et je ne cesserai de faire des vœux pour tout ce qui pourra contribuer à votre félicité.

Je suis avec une très-parfaite estime et l'amitié qu'on ne peut vous refuser,



Mon cher Diaphane,

Votre très-fidèlement affectionne ami,
Frederic.