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XXIX. ÉLÉGIE DE LA VILLE DE BERLIN, ADRESSÉE AU BARON DE PÖLLNITZ.

Viens à moi, fille des cieux, déesse de la douleur, des cœurs tendres; que tes larmes généreuses coulent aujourd'hui en faveur d'une amante abandonnée; que tes cheveux épars et flottants soient les modèles de mon ajustement; que ma voix soit l'écho de tes accents plaintifs. C'est à toi d'ennoblir ma douleur, et de donner des grâces au désespoir dans lequel me plonge le plus perfide des hommes. Jours heureux que je passais avec lui, vous ne faites qu'aigrir ma peine et mon noir chagrin, lorsque je vous compare à la situation délaissée où je me trouve à présent; ces beaux jours où mes fiacres,a régis par la sagesse de mon amant, me réjouissaient par chaque secousse qu'ils donnaient à mon pavé, prenant ces secousses pour des agaceries de mon infidèle; ces jours où il réglait toutes ces cérémonies ridicules qui passaient par mes rues ou dans mes maisons; ces jours où mes Haudeb et mes des Champsa chantaient ses éloges dans toutes les gazettes;


a Les premiers fiacres qu'on ait vus à Berlin y furent établis le 24 décembre 1739, sur la proposition du baron de Pöllnitz.

b Libraire de Berlin qui fonda, en 1740, un nouveau journal dont le premier numéro est daté du 30 juin de la même année.

a Voyez t. XIV, p. 323.