<106>Dans Pöllnitz tout l'homme paraît;
Sans l'embarras de l'intérêt,
Sans bien, content de peu de chose,
Dans l'univers rien ne s'oppose
Aux vœux de votre cœur discret.
Qu'à vos désirs je porte envie,
O sage, ô fortuné baron!
Sans le fardeau d'un trop grand nom,
Vous passez en paix votre vie;
La fausseté n'a point le front
De pavaner sa face impie
Pour tromper votre bonhomie
Au milieu de votre salon;
Au lieu qu'un roi, pour l'ordinaire,
Les matins, lorsqu'il se fait voir,
Dans ces vains respects du devoir
Que lui rend sa cour mercenaire
Ne lit point dans le caractère;
Il peut croire, sans penser noir,
Que dans lui l'intérêt vénère
Et la fortune, et son pouvoir.
Heureux votre rustique gîte!
Lorsque quelqu'un vous y visite,
C'est l'effet pur de l'amitié;
Et si vous dînez en ermite,
Jamais vous n'êtes ennuyé
Par les propos d'un parasite,
Adulateur d'un Sybarite,
A ses dépens rassasié.
Vous ignorez quelle est la peine
D'arrondir un ample domaine
Pour favoriser de ce lot
Quelque parent ingrat ou sot;
Et quand la fièvre et la migraine
Minent votre tempérament,
Vous ne redoutez point la gêne
De dicter, en agonisant,