<43>Là ne règne point la folie
Des assommants et longs repas
Que la coutume règle avec sa tyrannie,
Où l'ennui bâillant s'associe
A la profusion des modernes Midas,
Où le rire glacé tout hautement renie
La discordante compagnie,
L'étiquette et les embarras.
Une table à midi frugalement servie,
Qu'on sait assaisonner par d'utiles propos,
Où les traits pétillants de la vive saillie
S'égayent quelquefois sur le compte des sots,
Y pourvoit sans excès aux besoins de la vie;
On y préfère des bons mots
La saillante plaisanterie
A la gourmande intempérie
De vos Apicius et de tous leurs héros.
Là ne paraît point sur la scène,
Dans les convulsions des longs embrassements,
L'infâme fausseté, ni l'implacable haine,
Dont la perfide bouche articule avec peine
La trahison des compliments.
Là ne se trouvent point ces gens
Que l'amour-propre peint des couleurs les plus belles,
Qui sur tous les sujets sont de parfaits modèles;
Leur discours est comme un miroir
Où leur fatuité s'admire et se fait voir.
Là ne se trouvent point ces bégueules titrées,
Ces prudes en chaleur, ces froides mijaurées,
Qui discutent des riens, et qui rient en chorus.
Là ne sont, grâce au ciel, connus
Ces longs discoureurs méthodiques,
Argumenteurs métaphysiques,
Tous ânes baptisés en us.
Là n'habite point la critique
Au ris malin, à l'air caustique,
Ces atrabilaires Argus