<22>Dont l'orgueil couvre la raison,
Comme aux doux rayons de l'aurore
Le brouillard épais s'évapore,
Qui s'étendait sur l'horizon.

Ministres qui suivez l'exemple
Des Cinéasa et des Mornay,b
Vous seuls vous méritez un temple
Aux plus grands hommes destiné;
Vous dont la critique sévère
En reprenant a l'art de plaire,
Vous êtes seuls de vrais amis.
Flatteurs, n'employez plus la ruse,
Ne croyez point qu'elle m'abuse,
Je connais vos traits ennemis.
Césarion,a ami fidèle,
Plus tendre que Pirithoüs,
Je retrouve en toi le modèle
De la première des vertus.
Que notre amitié sans faiblesse
Nous dévoile avec hardiesse
Et nos erreurs et nos défauts :
Ainsi l'or que le feu prépare
Se purifie, et se sépare
Du plomb et des plus vils métaux.

(Envoyée à Voltaire le 6 janvier 1740.)


a Voyez t. VIII, p. 23, et Boileau, Épître I.

b Voyez t. VIII, p. 58.

a Didier baron de Keyserlingk, né en 1698, mort en 1745.