<135>Utile à sa patrie et doux dans le pouvoir.
L'État fait affronter les périls de la guerre,
Qui sauve sa patrie est un dieu sur la terre;
Par le puissant effort d'un esprit vertueux,
Il perd pour ses parents le jour qu'il reçut d'eux.
Ainsi Léonidas, au pas des Thermopyles,
S'immola pour la Grèce, et rendit inutiles
Les efforts redoublés de ces fiers conquérants;
Son audace étonna la valeur des Persans.
Ainsi chez les Romains le généreux Décie
Pour fixer la victoire abandonna sa vie.
Illustres défenseurs, héros des Prussiens,
Vous avez surpassé ces héros anciens,
Vous serez désormais nos dieux et nos exemples.
Malheureuse jeunesse, accourez à leurs temples,
Abhorrez vos fureurs; loin de vous égorger,
Apprenez que vos jours doivent se ménager.
Si vous osez jamais prodiguer votre vie,
Ainsi que ces héros mourez pour la patrie;
Leurs grands noms dureront jusqu'à la fin des temps,
Autant que l'univers aura des habitants,
Et que l'astre des jours du haut de sa carrière
Dispensera sur eux sa brillante lumière.

(Envoyée à Voltaire au commencement de décembre 1749.) Corrigée à Berlin, ce 9 janvier 1750.