<253>vons-nous aux citoyens auxquels nous lie le pacte social. Souffrez que je touche encore un mot des provinces de notre monarchie, envers lesquelles vous me paraissez si tiède. Ne comprenez-vous donc pas que si le gouvernement perdait ces provinces, il en serait affaibli, et que par conséquent, les ressources qu'il en a tirées venant à lui manquer, il serait moins en état de vous assister, si vous en aviez besoin, qu'il ne l'est à présent?

Vous voyez, mon cher ami, par ce que je vous expose, que les combinaisons de l'état politique sont très-étendues, et qu'on ne s'en fait point d'idée juste à moins de les approfondir; mais voici une nouvelle assertion que je ne saurais vous passer. Quoi! vous, qui êtes doué d'esprit et de talents, vous osez avancer que la végétation des plantes a de l'avantage sur l'activité animale! Se peut-il qu'un homme sensé préfère un lâche repos à un travail honorable, une vie molle, efféminée autant qu'inutile, à des actions vertueuses qui rendent immortel le nom de celui qui les a faites? Oui, nous allons tous nous acheminer vers notre tombeau, c'est une loi commune; mais la différence qu'on met entre les morts, c'est que les uns sont oubliés aussitôt qu'enterrés, et que ceux qui se sont souillés de crimes laissent une mémoire odieuse; au lieu que les hommes vertueux dont les services ont été utiles à la patrie, comblés de louanges et de bénédictions, sont cités pour servir d'exemple à la postérité, et laissent un souvenir qui ne périt jamais. Dans laquelle de ces trois classes voulez-vous être compris? Sans doute dans la dernière.

Après avoir détruit tant de faux raisonnements, vous ne devez vraiment pas vous attendre que votre Épicure, tout Grec qu'il est, m'en impose. Agréez que pour le réfuter solidement je commente ses propres paroles. « Le sage ne doit se mêler ni d'affaires ni de gouvernement. » Oui, s'il habite une île déserte. « Son âme impassible ne doit être exposée à aucune passion, ni à la mauvaise humeur, ni à la jalousie, ni à la colère. » Voilà donc Épicure, le docteur de la vo-