<231> ne serviront jamais d'exemples. Ces sortes de liaisons ne peuvent être que momentanées, au lieu que le genre des autres, contractées par un intérêt commun, peut seul être durable. Dans la situation où l'Europe est de nos jours, où tous les princes sont armés, parmi lesquels il s'élève des puissances prépondérantes capables d'écraser les faibles, la prudence exige qu'on s'allie avec d'autres puissances, soit pour s'assurer des secours en cas d'attaque, soit pour réprimer les projets dangereux de ses ennemis, soit pour soutenir, à l'aide de ces alliés, de justes prétentions contre ceux qui voudraient s'y opposer. Mais ceci ne suffit pas; il faut avoir chez ses voisins, surtout chez ses ennemis, des yeux et des oreilles ouverts, qui rapportent fidèlement ce qu'ils ont vu et entendu. Les hommes sont méchants; il faut se garder surtout d'être surpris, parce que tout ce qui surprend effraye et décontenance, ce qui n'arrive jamais quand on est préparé, quelque fâcheux que soit l'événement auquel on doit s'attendre. La politique européenne est si fallacieuse, que le plus avisé peut devenir dupe, s'il n'est pas toujours alerte et sur ses gardes.

Le système militaire doit être également assis sur de bons principes qui soient sûrs et reconnus par l'expérience. On doit connaître le génie de la nation, de quoi elle est capable, et jusqu'où l'on ose risquer ses entreprises en la menant à l'ennemi. Dans nos temps, il nous est interdit d'employer à la guerre les usages des Grecs et des Romains. La découverte de la poudre à canon a changé entièrement la façon de faire la guerre. Maintenant c'est la supériorité du feu qui décide de la victoire; les exercices, les règlements et la tactique ont été refondus pour les conformer à cet usage, et récemment, l'abus énorme des nombreuses artilleries qui appesantissent les armées nous force également d'adopter cette mode, tant pour nous soutenir dans nos postes que pour attaquer l'ennemi dans ceux qu'il occupe, au cas que d'importantes raisons l'exigent. Tant de raffinements nouveaux ont donc si fort changé l'art de la guerre, que ce serait de