<184>rents partis, qu'il examine, qu'il penche vers l'un ou vers l'autre, et qu'enfin il se détermine par son choix? L'auteur me répondra sans doute que la nécessité dirige ce choix. Je crois entrevoir dans cette réponse un abus du terme de nécessité confondu avec ceux de cause, de motif, de raison. Sans doute que rien n'arrive sans cause, mais toute cause n'est pas nécessaire. Sans doute qu'un homme qui n'est pas insensé se déterminera par des raisons relatives à son amour-propre; je le répète, il ne serait pas libre, mais fou à lier, s'il agissait autrement. Il en est donc de la liberté comme de la sagesse, de la raison, de la vertu, de la santé, qu'aucun mortel ne possède parfaitement, mais par intervalles. Nous sommes, en quelques articles, patients sous l'empire de la fatalité, et, en quelques autres, agents indépendants et libres. Tenons-nous-en à Locke. Ce philosophe est très-persuadé que, lorsque sa porte est fermée, il n'est pas le maître d'en sortir, mais que, lorsqu'elle est ouverte, il est libre d'agir comme bon lui semble. Plus on quintessencie cette matière, plus elle s'embrouille; on parvient à force de raffinements à la rendre si obscure, qu'on ne s'entend plus soi-même; il est surtout fâcheux pour les partisans du fatalisme que leur vie active se trouve sans cesse en contradiction avec les principes de leur spéculation.

L'auteur du Système de la nature, après avoir épuisé tous les arguments que son imagination lui fournit pour prouver qu'une nécessité fatale enchaîne et dirige absolument les hommes dans toutes leurs actions, devait donc en conclure que nous ne sommes que des espèces de machines, ou, si vous voulez, des marionnettes mues par les mains d'un agent aveugle. Cependant il s'emporte contre les prêtres, contre les gouvernements et contre l'éducation; il croit donc que les hommes qui occupent ces emplois sont libres, en leur prouvant qu'ils sont des esclaves. Quelle absurdité! quelle contradiction! Si tout est mû par des causes nécessaires, les avis, les instructions, les lois, les peines, les récompenses deviennent aussi superflues qu'inutiles; c'est dire à un