<17> Pour cet effet, il se trouve un petit duché de Luxembourg à envahir, un petit électorat de Trèves à acquérir par quelque traité, un duché de Liége par droit de bienséance; les places de la Barrière, la Flandre et quelques bagatelles semblables devraient être nécessairement comprises dans cette réunion; et il ne faudra à la France que le ministère de quelque homme modéré et doux qui, prêtant, s'il m'est permis de m'exprimer ainsi, son caractère à la politique de sa cour, et qui, rejetant toutes les ruses et tous les détours de ses artifices sur le compte des ministres subalternes, conduise, à l'abri de dehors respectables, ses desseins à une heureuse issue.

La France ne se précipite en rien. Constamment attachée à son plan, elle attend tout des conjonctures : il faut, pour ainsi dire, que les conquêtes viennent s'offrir à elle naturellement; elle cache tout ce qu'il y a d'étudié dans ses desseins, et il semble, à n'en juger que par les apparences, que la fortune la favorise avec un soin tout particulier. Ne nous y trompons point : la fortune, le hasard, sont des mots qui ne signifient rien de réel. La véritable fortune de la France, c'est la pénétration, la prévoyance de ses ministres, et les bonnes mesures qu'ils prennent. Voyez avec quel soin le cardinal se charge de la médiation entre l'Empereur et le Turc. L'Empereur, en reconnaissance de ce service, ne peut faire moins que de céder à Louis XV ses droits sur le Luxembourg. Ce duché, selon toutes les apparences, doit être une des premières acquisitions qui suivront la Lorraine : car, comme la France a eu des égards en toute chose pour les arrangements que l'Empereur a cru devoir prendre, il semble que la justice exige de semblables égards du côté de l'Empereur pour les arrangements de la France : ce n'est qu'un flux et reflux de reconnaissance, que la politique de ces princes sait rendre utile à leur grandeur.

Quant aux autres pays que la France pourrait conquérir, il est de sa prudence de ne point trop se hâter, afin de s'affermir dans ses