<78>tions, qui touchaient presque à Chotzim, rendraient la cour impériale, à la première guerre que les Russes auraient avec les Turcs, arbitre des événements, parce que ses possessions nouvelles lui donnaient le moyen de couper, par le Dniester, les Russes de la Pologne, d'où ils doivent tirer tous leurs magasins.

Le Roi avait aussi des sujets de plainte contre la cour de Vienne, parce qu'elle était cause qu'il avait fait désister les Russes de leurs conquêtes. Ces tromperies ouvertes découvraient l'avidité de s'agrandir des Autrichiens, leur ambition démesurée, et devaient mettre les autres puissances en garde contre ce qu'ils pourraient vouloir entreprendre à l'avenir. L'on savait que le jeune empereur désirait la conquête du Frioul vénitien, qu'il avait des projets sur la Bavière, qu'il méditait de s'emparer de la Bosnie, sans compter la Silésie, l'Alsace et la Lorraine, dont il n'avait pas oublié la perte. Ce prince était l'ennemi irréconciliable de la maison de Brandebourg, de sorte qu'il fallait, par principe, s'opposer à son agrandissement. Les Russes auraient voulu que le Roi se chargeât de tout, et que, comme un vaillant champion, il provoquât l'Autriche au combat. Mais les Turcs, qui étaient lésés, gardaient un morne silence : comment assister qui ne se plaint pas? Les Russes étaient épuisés par la guerre dont ils sortaient, sans avoir les moyens ni la volonté de se joindre au Roi. La France ne s'était point expliquée sur le sujet de ces événements, et l'Angleterre était engagée dans une guerre civile avec ses colonies, entreprise par esprit de despotisme, conduite avec maladresse; et l'on pouvait s'attendre qu'elle ne se terminerait pas dans les premières années. Ces considérations réunies firent que la cour de Berlin demeura dans l'inaction, et le Roi écrivit à Pétersbourg qu'il ne lui convenait pas de faire le Don Quichotte des Turcs.

Dans le temps que l'animosité était la plus vive entre ces trois cours, la délégation devait envoyer des députés pour régler avec ceux des trois puissances les limites de leurs possessions. Ceux des