<43> la cour de Pétersbourg ne voulût pas les modérer, Leurs Majestés Impériales seraient forcées de prendre part à cette guerre; qu'elles se flattaient que, dans ce cas, le Roi observerait une parfaite neutralité, d'autant plus que ses engagements avec la Russie se bornaient à la Pologne, dont les Autrichiens respecteraient le territoire.

On voyait bien que la cour de Vienne ne voulait absolument pas que les Russes devinssent ses voisins : d'une part, elle craignait qu'un nombre de Grecs répandus en Hongrie ne s'attachassent à cette puissance par religion; d'autre part, elle aimait mieux être voisine de l'empire affaibli des Turcs que de l'empire formidable de la Russie. La situation où le Roi se trouvait entre ces deux cours impériales, était embarrassante : s'il consultait ses intérêts, il ne devait ni souhaiter, ni employer ses forces pour accroître la puissance des Russes, qui n'était que trop formidable. Ces raisons, d'autre part, étaient contre-balancées par des engagements solennels, qui obligeaient ce prince d'assister l'Impératrice son alliée dans toutes les occasions où elle serait attaquée par l'Impératrice-Reine; ou il fallait remplir ces engagements, ou il fallait renoncer aux fruits qu'on espérait d'en recueillir. De plus, le parti de la neutralité était plus dangereux pour la Prusse que celui de soutenir son alliée : les Autrichiens et les Russes se seraient battus, puis, en s'accommodant, ils auraient pu faire la paix aux dépens du Roi; ce prince aurait perdu toute considération; personne ne se serait fié à sa bonne foi; et après la paix, il serait demeuré isolé; ce qui serait indubitablement arrivé, si le Roi avait suivi un plan aussi défectueux.

Sa Majesté ne balança point : elle se détermina à remplir fidèlement ses engagements avec la Russie, et pour adoucir en même temps la cour de Vienne, elle la flatta de l'espérance qu'il ne serait pas impossible de fléchir l'impératrice de Russie, et de faire changer les vues qu'elle avait sur la Valachie et sur la Moldavie; mais en ajoutant que si c'en venait à une rupture entre les deux Impératrices, Sa Majesté