<170> devant le comte Fincka et le sieur de Hertzberg,a ses ministres, qui l'expédièrent infructueusement pour Vienne quelques jours après. Tout ce qui s'était passé dans cette négociation, fut communiqué aux ministres de la France et de la Russie, afin que, convaincus des procédés désintéressés de la Prusse, ils ne se laissassent point prévenir par les fausses expositions que leur en feraient les ministres de Vienne.

L'Impératrice-Reine désirait sincèrement la paix; son fils l'Empereur, dont elle connaissait l'ambition à la tête de ses troupes, lui faisait craindre la perte ou l'affaiblissement de son autorité : mais elle était mal secondée par son ministre le prince Kaunitz, qui, par des vues assez communes aux courtisans, s'attachait plutôt à l'Empereur, dont la jeunesse ouvrait une perspective plus brillante à la famille de ce ministre que l'âge avancé de l'Impératrice, de laquelle il n'avait plus de grâces à espérer. Le sort des choses humaines est d'aller ainsi : de petits intérêts décident des plus grandes affaires. L'Empereur, instruit de la négociation du sieur Thugut, en fut furieux; il écrivit à sa mère que si elle voulait faire la paix, il ne retournerait jamais à Vienne, et s'établirait à Aix-la-Chapelle, ou dans quelque lieu que ce pût être, plutôt que de s'approcher jamais de sa personne. L'Impératrice avait fait venir le grand-duc de Toscane, qu'elle envoya aussitôt à l'armée pour qu'il adoucît l'Empereur son frère, et lui inspirât des sentiments plus pacifiques. L'effet de cette entrevue fut de brouiller les deux frères, qui jusqu'alors avaient vécu dans la meilleure intelligence.

Cet enthousiasme du jeune César pour la guerre venait des fausses idées qu'il avait de la gloire. Il croyait qu'il suffisait de faire du bruit dans le monde, d'envahir des provinces, d'étendre son empire et de commander des armées, pour acquérir de la réputation, et il ne sen-


a Charles-Guillaume comte Finck de Finckenstein (t. III, p. 17) devint premier ministre de Cabinet après la mort du comte Podewils, arrivée en 1760, et le 5 avril 1763, Ewald-Frédéric de Hertzberg (t. V, p. 248), né en 1725, lui succéda dans la charge de second ministre de Cabinet.