<114>rant le cours de l'année 1771, pendant que les négociations étaient les plus vives, il était impossible de deviner quel parti prendrait la cour de Vienne : si ce serait celui de la Porte, ou celui de la Russie. Mais comme il semblait, par les apparences, que la maison d'Autriche penchait plutôt du côté des Turcs que de celui des alliés du Roi, il fut résolu de remonter toute la cavalerie, en y joignant l'augmentation. Ce furent huit mille chevaux qu'on acheta tout à la fois. Bientôt le bruit s'en répandit dans toute l'Europe; la cour de Vienne comprit que le roi de Prusse s'était déterminé à soutenir de toutes ses forces son alliée, l'impératrice de Russie, et l'on jugea à Vienne qu'il valait mieux partager les dépouilles de la Pologne avec les deux puissances qui en avaient fait la proposition, que de s'engager dans une nouvelle guerre où il y avait plus de hasards à risquer que d'avantages à espérer.

Le concert de ces trois cours occasionna le partage de la Pologne, comme nous l'avons déjà dit dans le chapitre qui traite de la politique. Ce chapitre-ci n'étant destiné qu'à ce qui regarde le militaire, nous n'envisagerons cette acquisition que de ce point de vue-là. Elle était très-importante, en ce qu'elle joignait la Poméranie à la Prusse royale. On aura remarqué, en lisant l'histoire de la dernière guerre, que le Roi avait été obligé d'abandonner toutes les provinces qui étaient séparées ou trop éloignées du corps de l'État. Ces provinces étaient celles du Bas-Rhin et de la Westphalie, surtout la Prusse royale. Cette dernière se trouvait non seulement séparée, mais coupée de la Poméranie et de la Nouvelle-Marche par un fleuve d'une profondeur et d'une largeur considérables. Il fallait être le maître de la Vistule pour pouvoir soutenir la Prusse royale; mais après que le partage fut réglé, le Roi pouvait élever des places sur les bords de ce fleuve et s'assurer les passages selon qu'il le jugeait convenable, et pouvait non seulement soutenir le royaume contre les ennemis, mais