<51> les charmes de la société; on l'accusait de s'adonner quelquefois trop à la boisson. Ce prince épousa à Vienne l'archiduchesse Marianne, sœur cadette de la Reine : il conduisit sa nouvelle épouse dans le Brabant, dont on l'avait fait gouverneur; après quoi, il revint à Vienne recevoir les ordres de la cour pour la campagne qui allait s'ouvrir.

Le dessein des Autrichiens était de reprendre la Lorraine, et de porter l'Empereur à l'abdication de l'Empire, pour recouvrer par ce sacrifice ses pays héréditaires. Leur armée s'assembla à Heilbronn; de là elle s'avança sur Philippsbourg, où Seckendorff s'était réfugié avec les débris des troupes bavaroises. A la nouvelle de l'approche du prince de Lorraine, M. de Coigny renforça les troupes impériales de tous les régiments allemands qui servaient dans son armée. Tous les préparatifs du prince de Lorraine annonçaient qu'il avait intention de passer le Rhin : ce passage lui était facilité par le traité que le roi d'Angleterre venait de conclure avec l'électeur de Mayence. La partialité de ce prince pour la cour de Vienne était trop marquée pour qu'on s'y trompât, et les subsides qu'il tirait des Anglais ne laissaient aucun doute que, malgré sa neutralité, il n'accordât aux troupes de la Reine le passage par Mayence, si on l'exigeait de lui.

Les Autrichiens, qui jouissaient déjà en imagination de leur fortune, ne pouvaient s'empêcher de laisser échapper de temps en temps des bluettes de fierté et d'arrogance. Ils faisaient construire un pont à Mannheim, et agissaient despotiquement dans le Palatinat. L'Électeur s'en trouva offensé, comme de raison. Cela donna lieu à des piquanteries; enfin cela finit par un message du prince de Lorraine à l'Électeur, pour lui faire signifier que s'il ne donnait pas son pont de Mannheim sur-le-champ, il le lui ferait enlever de force. Le maréchal Traun en fit des excuses à l'Électeur, en lui insinuant que c'était après une longue séance de table, où la tempérance n'avait pas trop été gardée, que le prince de Lorraine s'était expliqué en termes si peu mesurés.