<32> alors de marier le grand-duc son neveu, afin de s'assurer d'une lignée. Quoique son choix ne fût pas fixé, son penchant la portait à donner la préférence à la princesse Ulrique de Prusse, sœur du Roi. La cour de Saxe avait dessein de donner la princesse Marianne, seconde fille d'Auguste, au Grand-Duc, pour gagner du crédit, à la faveur de cette alliance, auprès de l'Impératrice. Le ministre de Russie, dont la vénalité aurait mis sa maîtresse à l'enchère, s'il avait trouvé quelqu'un d'assez riche pour la lui payer, vendit aux Saxons un contrat de mariage précoce. Le roi de Pologne le paya, et n'eut que des paroles pour son argent.

Rien n'était plus contraire au bien de l'État de la Prusse, que de souffrir qu'il se formât une alliance entre la Saxe et la Russie, et rien n'aurait paru plus dénaturé que de sacrifier une princesse du sang royal pour débusquer la Saxonne. On eut recours à un autre expédient. De toutes les princesses d'Allemagne en âge de se marier, aucune ne convenait mieux à la Russie et aux intérêts prussiens que la princesse de Zerbst. Son père était maréchal des armées du Roi, et sa mère, une princesse de Holstein, sœur du prince successeur de Suède, et tante du grand-duc de Russie. Nous n'entrons pas dans les détails minutieux de cette négociation; il suffit de savoir qu'il fallut employer plus de peine pour lui faire prendre de la consistance, que s'il se fût agi de la chose la plus importante. Le père de la princesse même y répugnait; luthérien comme on l'était du temps de la réforme, il ne voulut consentir que sa fille se fît schismatique, qu'après qu'un prêtre plus traitable lui eut démontré que la religion grecque était à peu près la même chose que la luthérienne. En Russie, M. de Mardefeld cacha si bien au chancelier Bestusheff les ressorts qu'il mettait en jeu, que la princesse de Zerbst arriva à Pétersbourg au grand étonnement de l'Europe, et que l'Impératrice la reçut à Moscou avec toutes les marques de satisfaction et d'amitié. Tout n'était pas aplani; il restait encore une difficulté à vaincre : c'était que les