<87> Brünn; il ne faut point la laisser tranquille, mais tâcher de lui intervertir les vivres qu'elle tirera de l'Autriche par Znaim. On pourrait dès lors détacher de gros partis sur la Taya. qui pourraient même pénétrer jusqu'aux environs du Danube. Si la campagne commence au mois de juin, qu'on bloque bien étroitement la ville d'Olmütz; au mois de niais de l'année suivante, elle aura été dépourvue de tout secours pendant dix mois, et il se pourrait que la lamine obligeât le commandant à se rendre, ou qu'il capitulât après une légère défense. Celte bataille perdue obligerait nécessairement la cour de Vienne de renforcer son armée en Moravie; celle de Bohême lui enverrait de gros détachements, et ce moment servirait de signal pour l'armée de Saxe afin d'entrer en action. La campagne d'après, il faudrait tourner les ennemis dans leur poste, tâcher de leur enlever des corps ou de les battre, et pousser avec force la guerre vers la Taya et les bords du Danube. L'armée de Saxe pousserait devant elle l'ennemi avec force, prendrait Prague, où l'on jetterait les dix mille hommes que l'on tirerait de Silberberg, et l'armée de Bohême en son entier pourrait pousser, par Budweis et Wittgenau, vers Linz sur le Danube. Cette position priverait l'armée autrichienne de tous les vivres qu'elle tire du haut Danube, et, les trente mille hommes de la grande armée qui servait à couvrir ses derrières n'y étant pas tous nécessaires, on pourrait, en cas que l'on eût eu de grands avantages, les détacher par Skalitz sur Presbourg. L'embarras des Autrichiens deviendrait extrême, et je crois que dans une telle position, où ils risqueraient de perdre Vienne, ils donneraient les mains à telle paix qu'on voudrait leur proposer. Je conviens que ce projet est hérissé de grandes difficultés, qu'il faut du bonheur pour le mener à une fin heureuse; mais, soit politique, soit guerre, soit toutes les opérations humaines fondées sur des contingents futurs et sur le calcul des probabilités, aucun ne réussit dans ses entreprises, à moins qu'il ne soit secondé de la fortune.