<100> ils s'affaiblissent encore davantage. S'ils n'y opposent rien, ils risquent de se voir couper de leurs vivres ou de leurs communications. Il vaudrait mieux, si le détachement de l'ennemi se trouvait à une bonne distance de sa grande armée, lui tomber sur le corps avec tout votre camp, afin de le battre et d'intimider par là votre adversaire. Toutefois il faut convenir que cette position est fâcheuse et désagréable pour un général qui s'y trouve, et qu'il doit redoubler d'activité, de vigilance, de présence d'esprit et, s'il peut, d'industrie, pour s'en tirer à son honneur. Mais dans le premier cas que j'ai proposé, où il vous reste quarante-cinq mille hommes contre soixante mille, les difficultés ne sont point à beaucoup près aussi considérables, parce que, si vous n'avez pas assez pour attaquer les autres, il vous reste du moins assez pour vous défendre. Souvent l'ennemi, après quelques avantages qu'il vient d'avoir, devient présomptueux; il se croit sûr de sa fortune, il méprise le vaincu, et il se néglige; il ne traite plus la guerre qu'en bagatelle, il ne se croit plus dans le cas de suivre rigidement les règles de l'art, il se détermine sans réflexion, il agit à la légère, et il vous fournit lui-même les occasions que vous ne devez pas laisser échapper pour regagner sur lui l'ascendant qu'une journée malheureuse vous a fait perdre. Si vous vous apercevez que la sécurité endort l'ennemi, c'est à vous de l'augmenter, car elle est le précurseur des désastres qui l'attendent. Enfin, tendez-lui des piéges de toutes les manières, pour que, s'il ne tombe pas dans les uns, il n'échappe pas aux autres; feignez de vouloir vous retirer devant lui, tâchez de lui faire faire quelque faux mouvement, et profitez sans perte de temps de ses moindres négligences. Si vous êtes plus faible que l'ennemi, et que vous attendiez des secours, vous commettriez une imprudence impardonnable, si vous hasardiez la moindre entreprise avant que les secours vous eussent joint; car vous risquez de perdre par votre impatience les avantages que ces secours vous procureraient sûrement, si vous leur donniez le temps de vous joindre. Ce n'est donc