<148> retirer, se présenter de si bonne grâce, que l'ennemi puisse croire plutôt que son intention est de combattre. Mais après avoir bien occupé les lieux difficiles de son passage, son décampement doit se faire avec toute la promptitude possible, sans cependant nuire à l'ordre. La disposition de l'échiquier sur plusieurs lignes me semble la meilleure. Les dernières troupes se rompent par les extrémités ou les ailes, de sorte que ce qui reste de l'armée se trouve toujours appuyé par les troupes que l'on a postées d'avance au défilé. Cachez donc toujours vos desseins à l'ennemi, tâchez de pénétrer les siens, réfléchissez longtemps, agissez avec vivacité et promptitude, ne manquez jamais de vivres, et à la longue vous serez le maître de votre ennemi. Mais ne vous endormez jamais, surtout réveillez-vous après vos succès; la bonne fortune est dangereuse, en ce qu'elle inspire la sécurité et le mépris de l'ennemi. Cela fut cause qu'un aussi grand homme que le prince Eugène se vit enlever ses magasins de Marchienne après l'affaire de Denain.

DE CE QUE L'ON PEUT OPPOSER AUX TROUPES LÉGÈRES DE LA REINE DE HONGRIE.

Les troupes légères de la reine de Hongrie obligent d'abord à faire deux détachements, l'un sur la droite, l'autre sur la gauche de votre armée, pour les empêcher de vous tourner. On peut opposer hussards à hussards, infanterie à infanterie; mais comme nous n'avons pas d'infanterie légère, il faudra penser sérieusement, avec le temps, de s'en former d'artificielle. On pourrait facilement former un ou deux régiments de déserteurs français, et trouver de vieux officiers qui ont été enveloppés dans la dernière réduction, pour les commander. Ces gens ne doivent faire que des partis, soit pour inquiéter des grand' gardes, des détachements, soit pour enlever de