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VI. CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC AVEC LE CHEVALIER DE CHASOT. (6 AVRIL 1765-17 JANVIER 1782.)[Titelblatt]

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1. DU CHEVALIER DE CHASOT.3_357-a

Lübeck, 6 avril 1765.



Sire,

L'intérêt que je prendrai toujours très-vivement à la gloire de Votre Majesté doit aussi me rendre attentif à tout ce qui peut regarder sa santé. Je vous ai vu plus d'une fois, Sire, tourmenté de maux de dents affreux; deux fois j'ai eu l'honneur de vous mener un nommé Cornou pour vous plomber une dent et apaiser vos douleurs. Je n'en connaissais pas de meilleur à Berlin; mais j'ai l'honneur d'assurer V. M. que le porteur de cette lettre, nommé L'Allemand, disciple de Capron et appelé en Russie, est un des plus habiles dentistes de l'Europe. Il a fait ici, en présence de plusieurs médecins, des opérations qu'on admire, et soulagé entièrement quantité de personnes qui souffraient cruellement depuis plusieurs années. Je vous supplie, Sire, de regarder avec bonté l'intention qui me fait prendre aujourd'hui la liberté de vous recommander ce dentiste très-expert, en cas<358> que V. M. en eût besoin. Je suis avec le plus grand attachement et le plus profond respect,



Sire,

de Votre Majesté
le très-humble et très-obéissant
serviteur,
Chev. de Chasot.3_358-a

2. AU CHEVALIER DE CHASOT.

Berlin, 4 janvier 1782.



Monsieur de Chasot,

Je suis bien persuadé de la sincérité des vœux que vous faites pour la conservation de mes jours, connaissant particulièrement vos sentiments pour moi. Je les agrée avec reconnaissance, en vous souhaitant dans cette circonstance une bonne santé et l'accomplissement de tout ce qui peut contribuer à votre bien-être, surtout que les finances françaises dont vous avez joui autrefois se soient également retrouvées, priant Dieu sur ce, M. de Chasot, qu'il vous ait en sa sainte et digne garde.

La pension que Necker a rayée, je vous souhaite qu'elle ressuscite, car je crois que le commandant ou gouverneur de Lübeck en a grand besoin.3_358-b

Federic.

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3. AU MÊME.

Berlin, 17 janvier 1782.



Monsieur le lieutenant-général de Chasot,

Je partage vos peines et vos espérances pour vos deux fils dans mon service. Mais, par l'intérêt que je prends à votre sort, je vous conjure de ne pas vous laisser abattre par les coups de fortune que vous avez éprouvés. Vos deux fils sont une fois placés,3_359-a et feront leur chemin dans mon armée, s'ils sont sages et appliqués au service; et au reste mon amitié vous est assurée pour la vie. Sur ce, je prie Dieu, M. le lieutenant-général de Chasot, qu'il vous ait en sa sainte et digne garde.

Federic.


3_357-a Cette lettre, dont l'autographe est conservé aux Archives de l'État (F. 92. Zz), et les deux suivantes, que nous tenons de madame de Bredow, née comtesse de Chasot, à Markau près de Nauen, complètent la correspondance de Frédéric avec le chevalier de Chasot, que nous avons imprimée t. XXV, p. 319-329. Voyez aussi t. XXVI, p. 569 et 570; t. XXVII. I, p. 52.
      Le chevalier de Chasot, né à Caen en Normandie, le 18 février 1716, mourut à Lübeck le 24 août 1797. Une affaire d'honneur, dans laquelle il tua un officier, le força de quitter sa patrie et de se réfugier auprès du prince Eugène, pendant la campagne que celui-ci faisait aux bords du Rhin, en 1734. Il dit dans ses Mémoires (inédits) que ce fut là que Frédéric le prit à son service; ce ne serait donc pas à la cour de Mecklenbourg. comme nous l'avons dit t. XXV, p. III.

3_358-a On lit au bas de l'autographe de cette lettre ces mots, au crayon, de la main d'un conseiller de Cabinet : Zu spät, die Zähne fort.

3_358-b De la main du Roi.

3_359-a Voyez t. XXV, p. 327 et 328, no 9.