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1. DU COMTE DE HODITZ.3_323-a

Rosswalde, 24 février 1766.



Sire,

Le prince Frédéric-Auguste votre sérénissime neveu m'écrit que vous vous portez à merveille. Quelle nouvelle pour un cœur qui vous aime autant que le mien! Retournons à Landeck, Sire, de grâce retournons-y. Bénies en soient les eaux qui ont affermi votre santé, et bénie la solitude qui m'a fait goûter les plaisirs du ciel par votre présence!3_323-b Vous célébriez, le 24 de janvier, l'auguste jour de votre naissance. Ah! Sire, vous faites l'ornement du siècle et la joie de mon cœur. Vivez donc aussi jusqu'à l'oubli des siècles; et pour vous prouver que l'esprit de Rosswalde ne se nourrit que de vous, j'ai envoyé à monseigneur le prince Frédéric de Brunswic la description de la fête que j'ai donnée à Rosswalde le 24 de janvier, à l'occasion de ce grand jour, en présence d'au delà de quarante de vos officiers civils et militaires. J'y ai ajouté toute la musique et les beaux vers lyriques latins de l'abbé Tanzini, fameux poëte toscan, qu'il a faits pour ce jour glorieux, en forme de panégyrique, avec ma réponse française là-dessus. Cet abbé est actuellement en chemin pour Berlin, d'où il veut passer en Angleterre, et de là retourner dans sa patrie, où il a un petit bénéfice. Il est connu de l'abbé Landi.3_323-c C'est un homme<324> tout poëte, de sorte que je crois que l'envie lui prendra un jour de dire la messe en vers. Quoi qu'il en soit, ses vers sont dignes de la latinité d'or. Si vous daigniez les voir, Sire, j'espère que vous en conviendriez. Je me donne en même temps la liberté de vous envoyer dix-huit barils du meilleur brunze3_324-a que j'aie pu trouver. Pourquoi ne suis-je pas en état de vous rendre maître du monde, comme vous l'êtes de mon cœur, car je ne connais d'autre félicité que celle de vivre et de mourir, avec tout l'amour, zèle et dévouement imaginable,



Sire,

Votre très-humble, très-obéissant,
très-soumis, très-attaché et
très-fidèle serviteur,
Le comte de Hoditz.

Oh! que vous êtes aimé ici, Sire, et de quelle façon, grand Dieu! Puissiez-vous pénétrer dans les replis les plus cachés de notre cœur! Quel amour et fidélité n'y trouveriez-vous pas! De grâce, faites-vous rapporter nos vœux en musique, Sire. L'amour s'énonce dans toutes les langues.


3_323-a Cette lettre et la suivante sont le complément des lettres de Frédéric au comte de Hoditz que nous avons imprimées t. XX, p. 287-284. Les autographes en sont conservés aux Archives de l'État (F. 96. J).

3_323-b Voyez t. XX, p. 242 et t. XXIV, p. 21, 22, 23, 100, 102, 438 et 440.

3_323-c Poëte italien au service du Roi, arrivé à Berlin au mois de décembre 1765.

3_324-a Voyez t. XX, p. 245.