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32. A LA MARGRAVE DE BAIREUTH.

Ruppin, 24 août 1735.



Ma très-chère sœur,

Il est assez incertain si j'aurai le bonheur de vous voir. L'on commence à dire de nouveau que l'armée se rassemble, en quel cas je pourrais peut-être bien encore y aller, restant paisiblement, en attendant, ici, où je me passe le temps le plus doucement qu'il m'est possible. Je lis et écris comme un forçat, et j'ai musique pour quatre. J'ai avancé dans la composition jusqu'à faire une symphonie. Dès qu'elle sera toute achevée, je prendrai la liberté de vous l'envoyer. Il n'y a pas un chat à fouetter ici, ni de nouvelles qui soient dignes de vous être apprises. Je me mets aussi dans le jardinage, et j'ai commencé à me faire un jardin; la maison de plaisance est en forme de temple, consistant en huit colonnes doriques qui soutiennent un dôme, au-dessus duquel est la statue d'Apollon. Dès qu'il sera achevé, nous y ferons nos sacrifices, et vous comprenez bien, ma très-chère sœur, qu'ils vous auront pour objet, comme protectrice des beaux-arts. Recevez-les, je vous conjure, n'étant que de faibles marques de la tendre amitié et de la haute considération avec laquelle je suis toute ma vie, ma très-chère sœur, etc.