<548> amour-propre en aurait eu sa part; mais quand on examine ces choses avec réflexion et avec suite, et surtout lorsqu'il passe à quelqu'un autant de procès d'iniquités, et quelquefois des actions atroces, pour en confirmer les sentences, on est obligé, comme je le fais, de convenir que tant que le monde ne sera habité que par des hommes, on ne les contiendra pas davantage pour les mœurs qu'ils ne le sont à présent. Peut-être quelque globe qui nous est inconnu se trouve-t-il habité par des anges, ou par ce sage idéal des stoïciens, ou par quelque nature supérieure à notre espèce, et là il se pourra que la religion et la morale fassent plus d'effet sur les mœurs de ces habitants que ces mêmes choses n'en opèrent dans notre monde. Le parti le plus raisonnable est de nous prendre comme nous sommes, et de dire avec l'ange Ituriel : Si tout n'est pas bien, tout est passable.a

Je suis bien aise d'apprendre, mon cher frère, que vous venez cet hiver à Berlin. Au moins souvenez-vous qu'il y aura deux ans que je n'ai pas eu le plaisir de vous voir; c'est un siècle pour un homme de mon âge. J'espère ainsi que je pourrai dans peu vous assurer de vive voix de la tendresse infinie et de la haute estime avec laquelle je suis, etc.

367. AU MÊME.

Le 7 décembre 1781.



Mon très-cher frère,

Vous avez la bonté de prendre part à la situation où je me trouve; cependant, mon cher frère, je n'ai pas à me plaindre, car il faut bien


a Voyez t. XXIII, p. 101 et 322; t. XXIV, p. 298, 299 et 701.