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318. DU PRINCE HENRI.

Camp de Plauen, 13 juillet 1778.



Mon très-cher frère,

Notre boulangerie n'est arrivée qu'hier. Avant le 16, l'armée ne peut être fournie de pain pour neuf jours, et avant ce moment je n'ai rien pu entreprendre. Il n'y a que deux projets que je puisse avoir, l'un de passer en Bohême par le Basberg, route principale, et d'autres routes mauvaises où le canon ne saurait passer. Mais ce projet m'expose à tout plein d'inconvénients : 1o j'entre en Bohême par des corps séparés les uns des autres; 2o j'ai toutes les difficultés pour les vivres; 3o je cours risque que le gros de l'armée se jette en Lusace; j'aurais alors tous les défilés derrière moi, il me serait impossible de pouvoir parer à tous les coups qui pourraient être portés par là. Voici donc à quoi je me détermine. Je prends tous les arrangements comme si j'entrais de ce côté-ci en Bohême; mais je ferai jeter deux ponts sur l'Elbe, près de Pirna. Je marche sur Stolpen et Neustadt. Je détache un corps qui prend Tetschen. J'ai toutes les hauteurs de ce côté de l'Elbe pour moi. Tous les retranchements qu'ils ont faits leur deviennent inutiles; je puis peut-être brûler leurs dépôts à Aussig, Lowositz et Leitmeritz; j'empêche que l'on détache vers votre armée, mon cher frère, et je favorise vos opérations. Je puis traîner mes vivres sur la rivière jusqu'à Königstein; je couvre tout notre pays, et, si le sort me favorise, je puis, en faisant cette marche vers Leipa, et ma droite vers l'Elbe, repousser Loudon, qui est à Niemes, et qui vient tous les jours vers Zittau, où les gens lui ont parlé; je puis le séparer de l'Elbe, et peut-être, avec le temps, m'ouvrir une communication avec vous. S'il est possible que vous détachiez quelque chose à ces gens qui sont vis-à-vis de moi, entre Niemes et Gabel, je vous réponds que je favoriserai tout de mon côté,