68. DE L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.

Dresde, 4 août 1766.



Sire,

Mon âme s'ouvre à l'amour-propre toutes les fois que je reçois de vos lettres. Il est bien flatteur d'être louée par celui qui a surtout le droit de distribuer les éloges, puisqu'il les réunit tous. V. M. m'encourage en m'enorgueillissant. J'ai besoin du secours de vos cajoleries pour me soutenir dans une correspondance dont mon esprit ne se tire pas aussi aisément que mon cœur. Tout le monde ne rassemble point comme vous, Sire, les agréments de l'un et les qualités de l'autre.

Rien ne m'est plus précieux que le témoignage que V. M. me donne de sa confiance par le détail dans lequel elle entre sur son projet d'entrevue avec l'Empereur. J'ai dû faire et j'ai fait des vœux pour qu'elle eût lieu; le motif qui vous animait, Sire, est digne de vous. Au reste, ce sentiment m'a paru dans le cœur de ce prince; quoique avide d'acquérir tous les talents qui peuvent former le grand capitaine, il appréhende la triste nécessité d'en faire usage. Comme vous, Sire, il sent tout le prix de la vraie gloire, celle d'assurer le re<131>pos et le bonheur de ses peuples. Cette conformité d'inclinations n'offre rien que de consolant pour l'humanité, et en particulier pour la Saxe, qui doit prendre tant d'intérêt au maintien de la paix. Je suis, etc.