52. DE L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.

Dresde, 18 novembre 1765.



Sire,

A quelque cause que Votre Majesté attribue la durée de la paix, je suis réjouie de voir qu'elle nous la promet encore pour plusieurs années. L'Europe en a grand besoin; l'épuisement est général, et ne se borne pas aux coffres des puissances. Je ne connais point où passent les sommes immenses que les souverains dépensent aujourd'hui dans leurs guerres. On voit bien quelques entrepreneurs élever une fortune rapide, mais tout le reste paraît s'appauvrir. Il semble que l'or se dissipe dans les airs, comme la poudre par les coups de canon. Il faut maintenant que l'industrie et le commerce réparent les brèches. Par malheur arrive-t-il que l'on y mette des entraves entre les États de V. M. et la Saxe. Vous êtes si éclairé, Sire! Vous connaissez les saines maximes; je dois nécessairement penser que l'on aura fait à V. M. des rapports mal fondés, d'odieuses insinuations. Veuillez m'en croire, Sire, je connais un peu nos affaires, quoique je ne tienne pas le timon. Notre grand principe est la liberté du commerce et la réciprocité des avantages. Si V. M. veut adopter ce système, avec les restrictions que le besoin interne de chaque État peut rendre nécessaires, elle nous verra très-empressés à tout ce qui pourra contribuer<109> au bien commun des deux États. Je serais bien glorieuse et bien satisfaite, si je pouvais acheminer les choses à cette heureuse fin, et si je voyais s'affermir entre les États de V. M. et la Saxe un voisinage fondé sur des sentiments analogues à ceux avec lesquels je serai toute ma vie, etc.