<622> d'Horace, utile dulci,a l'utile à l'agréable. A l'égard des confédérés, je ne sais ce que mes confrères les philosophes en pensent; je crois bien qu'ils pourraient avoir gagné à n'être vus que de loin. Mais si ces confédérés se plaignent, à tort ou à droit, d'être opprimés par la Russie, j'entends, d'un autre côté, cent mille paysans et davantage, qui se plaignent ou qui peuvent se plaindre, non à tort, mais à très-grand droit, d'être opprimés de temps immémorial par ces mêmes confédérés; et tant que ces derniers seront oppresseurs, je ne verrai dans leurs ennemis qu'un maître qui rend à son valet de chambre les coups de bâton que celui-ci donne aux laquais. C'est à peu près le tableau que je me fais de l'état actuel de la Pologne, et je ne suis nullement surpris que V. M. travaille à empêcher, si elle le peut, que la guerre ne s'y allume encore davantage, et que les maux de l'humanité, déjà si accumulés dans ce malheureux pays, ne s'y entassent encore par de nouvelles dévastations. Ce projet et ces vues sont bien dignes de l'âme de V. M.; je sais plus, je sais qu'elle a fait proposer à une grande puissance de l'Europe de se rendre médiatrice, et je désirerais vivement, pour mille raisons, que les vœux si respectables de V. M. pussent être remplis à cet égard. Mais je n'entre point, comme de raison, dans le conseil et les desseins des rois, et je me contente de prier à la porte de leurs palais que la sagesse et l'amour de l'humanité y président, et règnent avec eux. S'il y a pour les mânes des sages un lieu de retraite, je ne doute pas que le pauvre Helvétius, quelque part qu'il soit, ne fasse des vœux semblables à ceux de V. M. et aux miens pour la paix et le bonheur de la malheureuse espèce humaine. J'ai vivement regretté ce digne, aimable et vertueux philosophe; à toutes les qualités respectables qui me le rendaient cher il en joignait une qui m'attachait encore particulièrement à lui; c'étaient les sentiments de respect et d'admiration dont il était rempli pour V. M. Combien de fois elle a fait le sujet de nos


a Art poétique, v. 343. Voyez t. XXI, p. 353.