<613>Pour ce qui vous regarde, je suis bien aise de voir la confiance que vous avez en moi; elle ne sera pas trompée, quoique ce délabrement des finances d'un prince qui a quatre cents millions de revenus me paraisse bien étrange. Vous voulez savoir si un manuscrit de Pline le naturaliste, qui concerne les guerres des Germains, se trouve à Magdebourg? Quoique je n'aie pas encore reçu de réponse de là-bas, je crois que c'est un fait controuvé, accrédité sur la foi d'un voyageur; car si un tel manuscrit existait, vous pouvez être persuadé qu'il serait connu; je n'en ai jamais entendu parler, non plus que nos doctes.

Je puis vous répondre avec plus de précision sur le sujet de cette dame qui prétendait passer pour l'épouse du czarowitz; son imposture a été découverte à Brunswic, où elle a passé peu après la mort de celle dont elle emprunta le nom; elle y reçut quelques charités, avec ordre de quitter le pays et de ne jamais prendre un nom dont sa naissance l'écartait si fort. Croyez qu'on sait comme il faut tuer son monde en Russie, et que lorsqu'on expédie quelqu'un, principalement à la cour, il ne ressuscite de sa vie. Le contraire pourrait nous arriver, à nous qui ne sommes pas aussi versés dans ce métier. Demandez donc, s'il vous plaît, quand vous verrez quelque ressuscité : De grâce, monsieur ou madame, où vous a-t-on tué? Et sur le pays qu'il vous nommera, jugez de la vérité du fait. Si l'on vous parle de la Judée, vous savez que c'était l'usage; si l'on vous nomme mon pays, doutez; si c'est la Russie, n'en croyez rien. Voilà vraiment une belle dissertation, digne de l'Académie des belles-lettres et inscriptions.

A propos, comme j'ai vu quelques ouvrages où la louange des Français n'est pas épargnée, faits par des auteurs qui postulaient une place à l'Académie française, et qui l'ont obtenue, je me suis avisé de me mettre sur les rangs; et pour devenir un de vos quarante babillards, je me suis proposé de faire l'apologie de quelques-unes des