<504> pape que hoc regnum suum non est hujus mundi,a et ce pauvre druide ultramontain sera obligé de se le persuader, s'il peut. Le Saint-Esprit l'a élu conditionnellement; que voulez-vous qu'il fasse? Il a perdu son crédit idéal, fondé sur la stupidité générale des nations; il supprimera les jésuites, comme autrefois un de ses prédécesseurs abolit l'ordre des Templiers; et les potentats orthodoxes et le vicaire de Céphas Barjoneb se partageront leurs dépouilles, tandis qu'un pauvre petit prince hérétique et tolérant ouvrira un asile aux persécutés. Quel tableau un peintre habile ne ferait-il pas de ces événements! Il vous dessinerait, d'un côté, le mufti rétablissant des évêques polonais dans leurs cathédrales, de l'autre, des popes russes combattant pour les enfants de Calvin; dans le lointain, un prince protestant protégeant les jésuites opprimés par de très-catholiques et de très-chrétiens monarques, et dans un nuage élevé, saint Ambroise, Luther, avec le patriarche Photius, croyant tous trois avoir la berlue, et ne comprenant rien à cet étrange spectacle. Si ce tableau s'achève, il sera destiné à orner le grand salon des Petites-Maisons de l'Europe.

Mais trêve de plaisanterie. L'édifice de l'Église romaine commence à s'écrouler, il tombe de vétusté. Les besoins des princes qui se sont endettés leur font désirer les richesses que des fraudes pieuses ont accumulées dans les monastères; affamés de ces biens, ils pensent à se les approprier. C'est là toute leur politique. Mais ils ne voient pas qu'en détruisant ces trompettes de la superstition et du fanatisme, ils sapent la base de l'édifice, que l'erreur se dissipera, que le zèle s'attiédira, et que la foi, faute d'être ranimée, s'éteindra. Un moine, méprisable par lui-même, ne peut jouir dans l'État d'autre considération que de celle que lui donne le préjugé de son saint ministère. La superstition le nourrit, la bigoterie l'honore, et le fanatisme le canonise. Toutes les villes les plus remplies de couvents sont celles


a Évangile selon saint Jean, chap. XVIII, v. 36.

b Voyez t. XXIII, p. 178.