<254>sais de saisir le premier moment où j'apprendrais le rétablissement de V. M., et je ne m'attendais nullement à être encore prévenue par vos bontés. Quoi! Sire, les premiers mouvements de cette main qui a si souvent tracé des lois au monde entier étaient pour moi! Y a-t-il rien de plus glorieux? Il faut bien qu'en effet je vaille mieux que beaucoup d'autres femmes, puisque tout ce que vous faites pour moi, Sire, tout ce que vous me dites, ne m'a pas fait tourner la tête. Je l'affermis tant que je puis; mais que V. M. y prenne garde, et qu'elle n'achève pas de me gâter; je ne le suis déjà que trop. Tout ce qui n'est pas de Frédéric ne m'intéresse que médiocrement. Je suis presque fâchée que tout le monde ne lui ressemble pas, et je ne songe plus que le ciel ne fait naître des hommes comme lui que pour montrer une fois au moins à quel point l'humanité peut être élevée.

Vous déroutez jusqu'à la goutte. Puissiez-vous, Sire, n'avoir plus de combats à lui livrer! puissiez-vous jouir de la paix et du repos que vous travaillez à donner à l'Europe! V. M. y parviendra, car qu'y a-t-il d'impossible pour elle? Mais il est triste, sans doute, que les hommes soient si réfractaires au bien qu'on veut leur faire, et que la bourse vide opère plus sur les puissants de la terre que l'amour de l'humanité. Malheureusement il y en a peu qui sachent apprécier leurs intérêts en philosophes. Je connais un héros sublime qui le sait; il allie tous les dons de l'âme qui paraissent incompatibles au vulgaire des hommes. Ce héros est le mien; il a, par-dessus l'héroïne de V. M., l'avantage d'être reconnu au moindre des traits qui lui échappent; indiquez-en un seul, l'univers le nomme, l'admire, le respecte, l'adore; je n'ai plus que l'avantage d'éprouver plus vivement et plus intimement des sentiments qui me sont communs avec le monde entier.

Recevez, Sire, avec les assurances de ces sentiments, les expressions de ma vive joie sur la naissance du neveu dont madame la prin-