<193> désirée ne parut point. Confus du mauvais succès de nos soins, nous avons renoncé au système merveilleux, et nous nous rabattons sur les événements communs et ordinaires. Pour en revenir au simple, j'ose assurer V. A. R. que les politiques de café me font plus d'honneur que je ne mérite, si mon individu occupe leurs spéculations oiseuses. Mais, de grâce, point de Salomon. Ce roi était sage, et je ne le suis guère; il avait un sérail de mille femmes, et ne croyait point en avoir assez; je n'en ai qu'une, et c'en est encore trop pour moi; il sacrifia aux idoles, et je n'ai jamais fléchi le genou devant Baal. Enfin, madame, de grâce, dessalomonisez-moi, et daignez me comparer plutôt au roi de Garbe.a Je vous crois, raillerie à part, très-supérieure à sa reine de Saba, et le désir que j'ai de jouir de votre présence n'est fondé que sur l'admiration que m'a inspirée le bonheur que j'ai eu de vous entendre, le peu de minutes que j'en ai joui à Moritzbourg,b et le plaisir de connaître plus particulièrement une princesse qui a réuni en elle tant de rares talents qui feraient la réputation d'une douzaine de particuliers.

J'accepte, madame, avec toute la reconnaissance possible la bénédiction que vous daignez donner aux noces de mon neveu. Sa nouvelle épouse paraît d'un très-bon caractère, et digne de mériter une part, madame, dans votre amitié; elle aime beaucoup l'électrice de Saxe sa cousine, et n'en parle qu'avec attendrissement. Puisse-t-elle me procurer le bonheur que vous m'avez fait espérer, et qui vient de s'évanouir! Ce serait alors que je pourrais assurer V. A. R. de vive voix de mon dévouement, de mon admiration, et de tous les sentiments avec lesquels je suis, etc.


a Voyez la Fiancée du roi de Garbe, conte de La Fontaine.

b Voyez t. XVIII, p. 257, et ci-dessus, p. 51.