<297> de votre sœur, Wilhelminae sacrum, est digne de la plus belle antiquité, et de vous seul dans le temps présent; madame la duchesse de Würtemberg versera bien des larmes de tendresse, en voyant le dessin de ce beau monument.

Le canal, les villes rebâties, les marais desséchés, les villages établis, la servitude abolie, sont de Marc-Aurèle ou de Julien. Je dis de Julien, car je le regarde comme le plus grand des empereurs, et je suis toujours indigné contre la Bletteriea qui ne l'a justifié qu'à demi, et qui a passé pour impartial, parce qu'il ne lui prodigue pas autant d'injures et de calomnies que Grégoire de Nazianze et Théodoret.

Je vous bénis dans mon village de ce que vous en avez tant bâti; je vous bénis au bord de mon marais de ce que vous en avez tant desséché; je vous bénis avec mes laboureurs de ce que vous en avez tant délivré d'esclavage, et que vous les avez changés en hommes. Gengis-Kan et Tamerlan ont gagné des batailles comme vous, ils ont conquis plus de pays que vous; mais ils dévastaient, et vous améliorez. Je ne sais s'ils auraient recueilli les jésuites; mais je suis sûr que vous les rendrez utiles, sans souffrir qu'ils puissent jamais être dangereux. On dit qu'Antoine fit le voyage de Brindes à Rome dans un char traîné par des lions; vous attelez des renards au vôtre, mais vous leur mettez un frein dans la gueule, et, quand il le faudra, vous leur mettrez le feu au derrière, comme Samson,b après les avoir attachés par la queue. Tout ce qui me fâche, c'est que vous n'établissiez pas une église de sociniens comme vous en établissez plusieurs de jésuites; il y a pourtant encore des sociniens en Pologne. L'Angleterre en regorge, nous en avons en Suisse; certainement Julien les aurait favorisés; ils haïssent ce qu'il haïssait, ils méprisent ce qu'il méprisait, et ils sont honnêtes gens comme lui. De plus, ayant été


a Voyez t. VII, p. 120; t. X, p. 10 et 159; t. XXI, p. 128; et ci-dessus, p. 128.

b Juges, chap. XV, v. 4 et 5.