<299> bien connue en Saxe, qu'on m'en a porté de grièves plaintes. Pour moi, j'ai conservé la paix dans ma maison jusqu'à votre arrivée : et je vous avertis que si vous avez la passion d'intriguer et de cabaler, vous vous êtes très-mal adressé. J'aime des gens doux et paisibles, qui ne mettent point dans leur conduite les passions violentes de la tragédie. En cas que vous puissiez vous résoudre à vivre en philosophe, je serai bien aise de vous voir; mais si vous vous abandonnez à toutes les fougues de vos passions, et que vous en vouliez à tout le monde, vous ne me ferez aucun plaisir de venir ici, et vous pouvez tout autant rester à Berlin.a

274. DE VOLTAIRE.

Février 1751.

Sire, je conjure Votre Majesté de substituer la compassion aux sentiments de bonté qui m'ont enchanté, et qui m'ont déterminé à passer à vos pieds le reste de ma vie. Quoique j'aie gagné ce procès, je fais encore offrir à ce juif de reprendre pour deux mille écus les diamants qu'il m'a vendus trois mille, afin de pouvoir me retirer dans la maison que V. M. permet que j'habite auprès de Potsdam. L'état où je suis ne me permet guère de me montrer, et j'ai besoin de faire des remèdes à la campagne pendant plus d'un mois. Permettez-moi de m'y aller établir la première semaine de mars, et de rester jusqu'au 5 ou au 6 mars dans votre château. C'est un homme assurément très-malade qui vous demande cette grâce. Songez aussi que c'est un homme qui n'a eu, en renonçant à sa patrie, que votre seule


a Voyez t. XXI, p. 8, 13 et 14.