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Ah! si j'avais vécu naguère,
Quelque trait mordant et sévère
M'eût déjà frappé de ta main.

Continuez cet excellent ouvrage pour l'amour de la vérité, continuez-le pour le bonheur des hommes. C'est un roi qui vous exhorte à écrire les folies des rois.

Vous m'avez si fort mis dans le goût du travail, que j'ai fait une Épître, une comédie, et des Mémoiresa qui, j'espère, seront fort curieux. Lorsque les deux premières pièces seront corrigées de façon que j'en sois satisfait, je vous les enverrai. Je ne puis vous communiquer que des fragments de la troisième; l'ouvrage en entier n'est pas de nature à être rendu public. Je suis cependant persuadé que vous y trouveriez quelques endroits passables.

Je vois que vous avez une idée assez juste de nos comédiens; ce sont proprement des danseurs dont la famille de la Cochois fait la comédie. Ils jouent passablement quelques pièces du Théâtre italien et de Molière; mais je leur ai défendu de chausser le cothurne, ne les en trouvant pas dignes.

La collection d'antiques du cardinal de Polignac est arrivée à bon port, sans que les statues aient souffert la moindre fracture.

Pourquoi remuer à grands frais
Les décombres de Rome entière,
Ce marbre et cette antique pierre?
Et pourquoi chercher les portraits
De Virgile, Horace, et d'Homère?
Leur esprit et leur caractère,
Plus estimables que leurs traits,
Se retrouvent tous dans Voltaire.

Le cardinal apostolique, qui pouvait vous posséder, avait donc grand tort de ramasser tous ces bustes; mais moi qui n'ai pas cet


a L'Histoire de mon temps. Voyez t. II, p. I et II.