<96> l'intelligence, et qui est au fait de leur gouvernement; il est, de plus, véridique. Je l'ai chargé de me répondre sur les mêmes points. Je crains que, en qualité d'Allemand, il n'abuse du privilége de diffus, et qu'au lieu d'un mémoire il ne compose un volume. Dès que je recevrai quelque chose que ce soit sur cette matière, je le ferai partir avec diligence.

Je ne vous demande pour salaire de mes peines qu'un exemplaire de la nouvelle édition de vos Œuvres. Je m'intéresse trop à votre gloire pour n'être pas instruit, des premiers, de vos nouveaux succès.

Selon la description que vous me faites de la vue de Cirey, je crois ne voir que la description et l'histoire de ma retraite. Remusberg est un petit Cirey, monsieur, à cela près qu'il n'y a ni de Voltaire ni de madame du Châtelet chez nous.

Voici encore une petite ode assez mal tournée et assez insipide : c'est l'Apologie des bontés de Dieu.a C'est le fruit de mon loisir, que je n'ai pu m'empêcher de vous envoyer. Si ce n'est abuser de ces moments précieux dont vous savez faire un usage si merveilleux, pourrai-je vous prier de la corriger? J'ai le malheur d'aimer les vers et d'en faire souvent de très-mauvais. Ce qui devrait m'en dégoûter, et rebuterait toute personne raisonnable, est justement l'aiguillon qui m'anime le plus. Je me dis : Petit malheureux, tu n'as pu réussir jusqu'à présent; courage, reprenons le rabot et la lime, et derechef mettons-nous à l'ouvrage. Par cette inflexibilité je crois me rendre Apollon plus favorable.

Une aimable personneb m'inspira dans la fleur de mes jeunes ans deux passions à la fois; vous jugez bien que l'une fut l'amour, et l'autre la poésie. Ce petit miracle de la nature, avec toutes les grâces possibles, avait du goût et de la délicatesse. Elle voulut me les com-


a Voyez t. XIV, p. III et IV, 7-11, 12-15, et 16-19.

b Madame de Wreech. Voyez t. XVI, p. V et VI, et 7-20.