<421>Je n'ai point ici les ouvrages de Boileau; mais je me souviens qu'il traduisit, en deux vers,a le vers d'Horace :

Tantalus a labris sitiens fugientia captat
Flumina.b

Vous, le Boileau des princes, vous le traduisez en un seul;c eh! tant mieux; cela en est bien plus fort et plus énergique. J'aime à vous voir imperatoriam gravitatem.

Ce n'est pas là le style qu'en général on reproche aux Allemands. Or, à présent que j'ai eu l'honneur de vous prouver en passant que vous aviez ce petit avantage sur Boileau, il n'est plus surprenant que je vous dise, monseigneur, en toute humilité, qu'il y a dans votre Épître plusieurs vers que je serais bien glorieux d'avoir faits. V. A. R. entend l'art de s'exprimer autant que celui d'être heureux dans toutes les situations. On dit ici Sa Majesté entièrement rétablie. Les vœux de votre cœur vertueux sont exaucés.

Vous direz toujours comme Horace :

Nave ferar magna an parva, ferar unus et idem.d

Les plaisirs, l'amitié, l'étude,
Vous suivront dans la solitude.
Du haut du mont Rémus vous instruirez les rois;
Le véritable trône est partout où vous êtes.
Les arts et les vertus, dans vos douces retraites,


a Boileau dit dans sa quatrième Satire, A M. l'abbé Le Vayer, v. 64 :
     

A grossir un trésor qui ne lui sert de rien.

Après ce vers il y en avait treize autres, que l'auteur a retranchés plus tard :
     

Dites-moi, pauvre esprit, âme basse et vénale,
Ne vous souvient-il point du tourment de Tantale,
Qui, dans le triste état où le ciel l'a réduit,
Meurt de soif au milieu d'un fleuve qui le suit? etc.

b Horace, Satires, liv. I, sat. 1, v. 68 et 69.

c Voyez l'Épître sur la Gloire et l'Intérêt, t. X, p. 89.

d Voyez ci-dessus, p. 159.