<252> et je suis plus qu'assuré que les Autrichiens perdent autant qu'elle à la rupture de l'échange.

Voilà, Sire, tout le côté de Halberstadt, de Magdebourg, de la Nouvelle-Marche tranquille, et qui n'aura rien à craindre pendant que vous serez occupé contre les ennemis qui vous restent. L'inaction des Français est une chose excellente par elle-même aujourd'hui, et, dans la suite, par les effets qu'elle produira immanquablement. Après le pas que font les Français d'offrir la paix aux Anglais, ils ne s'arrêteront pas dans leurs projets pour faire plaisir aux Autrichiens, qui doivent être au désespoir du commencement de la négociation avec les Anglais. Voilà la fin de la ligue de Cambrai, et j'ai toujours bien cru que cette guerre n'en aurait point d'autre.

Je conçois, par la façon dont V. M. me fait la grâce de me parler, qu'elle va incessamment ouvrir la campagne et se couvrir de gloire jusqu'à ce que ses ennemis soient réduits au point d'être plus raisonnables. Pendant, Sire, que vous ferez des marches et des contremarches, que vous gagnerez des batailles, je traduirai Plutarque le mieux qu'il me sera possible, pour vous l'offrir dans un français qui vous paraisse plus supportable que celui d'Amyot.a Je prendrai la liberté de me servir de votre copiste; je le logerai chez moi, où il sera, pour me servir du vers de Regnard,

Alimenté, rasé, désaltéré, porté.b

Je compte passer cet été dans une maison de campagne à cinq milles de Berlin, et travailler dans la plus grande tranquillité. Mon hôte s'est aussi avisé de vendre à Berlin la maison que j'habite, et, puisqu'il faut que je déloge, je ferai transporter tout de suite mes meubles à Potsdam; et, quant à moi, j'ai accepté l'offre qu'on m'a faite


a Jacques Amyot, l'éloquent et naïf traducteur de Plutarque, naquit en 1513, et mourut en 1593.

b Le Joueur de Regnard, acte III, scène IV.