20. A LA MÊME.

Leipzig, 22 janvier 1763.

Cinquante et un ans, ma bonne maman, ne sont pas une bagatelle. C'est presque toute l'étendue du fuseau de madame Clotho, qui file<175> nos destinées. Je vous rends grâces de ce que vous prenez part à ce que j'en sois là. Vous vous intéressez à un vieil ami, à un serviteur que ni l'âge ni l'absence ne font jamais changer de sentiments, et qui, à présent, espère avec une espèce de persuasion de vous revoir encore et de vous embrasser, si vous voulez bien le permettre. Oui, ma bonne maman, je crois que vous serez à Berlin avant que Flore ait embelli la terre de ses dons, pour m'exprimer poétiquement; et si je me réjouis sincèrement de revoir quelqu'un dans cette capitale, c'est bien vous; mais n'en dites rien. Ceci n'est pas poétique, et doit s'entendre au pied de la lettre. Que le ciel veille sur vos jours, et vous comble d'autant de bénédictions que votre vertu en mérite! Que je vous revoie en santé, contente et satisfaite, et que vous me conserviez toujours votre amitié! Je ne la mérite, ma bonne maman, que par l'attachement inviolable que j'ai pour vous, et que je conserverai jusqu'au moment que la Parque ennemie coupera ma trame.

Federic.