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3. DU MÊME.

Camp de Bouchant, 20 mai 1746.a



Sire,

J'ai reçu, il y a deux jours, la lettre que Votre Majesté m'a fait la grâce de m'écrire le 10 de ce mois.

Je ne mérite pas, Sire, les éloges dont V. M. m'honore, et ils ne servent qu'à me faire rentrer en moi-même, et me faire concevoir combien peu j'en suis digne. Ce n'est donc pas par amour-propre, mais par obéissance, que j'ai l'honneur de me conformer aux ordres que V. M. veut bien me donner, et que je vous rends compte, Sire, des opérations de l'armée qu'il a plu à Sa Majesté Très-Chrétienne de me confier. Vous y remarquerez peut-être quelques variations, Sire, dans la conduite; mais elles viendront moins du plan qui a été réglé que des circonstances, et V. M. sait très-bien que la partie militaire est toujours soumise à la politique. Ainsi je me flatte que V. M. ne m'attribuera pas toutes les fautes qui pourront se faire pendant le cours de cette campagne. Le moment où je me trouve vous persuadera, Sire, cette vérité; car je sens très-bien qu'une marche par notre droite, en tirant sur Bois-le-Duc, mettrait l'armée des alliés dans une situation critique.

J'ai fait prendre possession aujourd'hui d'Anvers; les alliés ont laissé, en différents détachements, environ deux mille hommes dans la citadelle, et M. le comte de Clermont-Prince est chargé d'en faire le siége. La circonvallation en sera faite demain, les préparatifs pour le siége tout de suite; ainsi je compte que le 25, au plus tard, la tranchée sera ouverte devant cette place.


a Dans les Lettres et mémoires choisis parmi les papiers originaux du maréchal de Saxe, Paris, 1794, t. II, p. 200, cette lettre ne porte que la date inexacte : Du 19 mai 1746.