<379> de l'être, et cette qualité le rend plus respectable à mes yeux que s'il était roi des rois. Qu'est-ce en effet que ce vain titre? et quel changement produit-il dans l'homme? Je dis qu'il n'en produit jamais d'avantageux, et qu'on a vu plus d'une vertu obscurcie sous l'ombre du trône. Il est vrai que les rois sont les symboles mortels de la majesté de Dieu, mais voilà tout; car ôtez-leur la puissance, la grandeur, leur cour et leurs flatteurs, il se trouve que ce ne sont, la plupart, que de pauvres hommes sans vertu et peu dignes d'inspirer de l'admiration. Vous me ferez donc grand plaisir de dire au comte Biron que je le félicite de tout mon cœur sur son avénement au duché de Courlande, que je prenais toujours part à la fortune des gens de mérite, et que, quelque inconnu qu'il me soit, il me suffisait d'être instruit de ses belles qualités pour m'intéresser vivement à tout ce qui pourra lui être avantageux.

Vous ne me parlez que du rappel de Seckendorff, et j'y ajoute la nouvelle de sa détention. Il est arrêté actuellement à Vienne. Ses ennemis l'accusent d'une infinité de malversations. Les principaux chefs d'accusation tombent sur les moyens illicites qu'il a mis en usage pour s'enrichir dans la dernière campagne. Ses amis débitent ici qu'il trouvera moyen de se purger de toutes ces imputations, et qu'il se lavera blanc comme neige. Pour moi, j'en doute, car il est connu que l'avarice fut de tout temps le vice auquel il a le plus fortement incliné. Ce qui est sûr, et sur quoi vous pouvez compter, c'est que son rôle est fini, et que jamais on n'entendra plus nommer le nom de Seckendorff. Le cardinal nepotea est parti de Berlin, et entre dans le service d'Ansbach.

Quelle vicissitude! quel changement rapide de la plus brillante fortune au malheur le plus inopiné! s'écrierait très-éloquemment un


a Par cette dénomination usitée à la cour de Rome, le Roi désigne le baron de Seckendorff, neveu du comte de Seckendorff, et auteur du Journal secret, publié à Tubingue en 1811. Voyez cet ouvrage, p. 185.