<320> les mesures nécessaires pour en être informé au plus tôt, afin de pouvoir remédier pour la suite à cet inconvénient. Je me flatte, monseigneur, que vous ne prendrez point en mauvaise part ces petites irrégularités qu'il n'a pas dépendu de moi de prévenir, et que vous voudrez bien être persuadé, au contraire, que rien au monde ne me tient tant à cœur que d'exécuter avec tout le zèle et toute la promptitude possibles les ordres dont il plaît à V. A. R. de m'honorer.

Mon libraire en cette ville m'a envoyé la traduction de la Logique de Wolff, par M. des Champs.a Je l'ai aussitôt parcourue des yeux avec avidité, et elle m'a paru bonne. Je suis ensuite tombé comme par hasard sur l'Épître dédicatoire, que je n'avais point d'abord remarquée. Je ne vous le cacherai point, monseigneur, mon cœur a tressailli en y voyant, à la tête, le nom de V.A. R., et un sentiment inconnu a fait bouillonner mon sang dans mes veines. Je crois, car pourquoi ne l'avouerais-je pas ingénument? je crois que c'était un mouvement d'envie. Mais, cette première impression passée, la raison a aussitôt repris son empire, et m'a aidé à étouffer un sentiment si indigne d'une personne que vous honorez de tant de bontés. Pour prix d'un aveu si plein de franchise, j'ose espérer que V. A. R. ensevelira à jamais dans l'oubli le souvenir de cette faiblesse, et daignera m'épargner par là la confusion dont le moindre mot de sa part sur ce sujet ne manquerait pas de me couvrir.

J'ai donc lu cette Épître avec le vif intérêt que m'inspire tout ce qui regarde V. A. R.; et, me mettant à sa place, c'est-à-dire, m'élevant bien loin au-dessus de moi-même par le sentiment de ses sublimes qualités, j'ai cru éprouver pour elle quelque embarras à cette lecture; non que V. A. R. ne soit, par toutes ses belles vertus, bien au-dessus de toutes les louanges, toutes vraies, quoique trop fadement exprimées, de cette Épître, mais parce que sa grande modestie refuse absolument de se reconnaître dans son propre portrait, et en est même


a Voyez t. XIV, p. 323, et la lettre de Frédéric à Voltaire, du 9 septembre 1736.