<59>truite; mais Sabaoth n'abandonne pas ses fidèles. Dans le moment que Barbe-bleue porte le glaive au cou de son épouse, voilà le saint des saints qui arrive, qui le terrasse, et qui abat Lucifer à ses pieds. L'Église est sauvée, et l'enfer en frémit de rage. Voyez combien cette allégorie est exacte, et combien les paroles de l'auteur sacré sont infaillibles. Les saints et les prophètes, auxquels le ciel a révélé les événements futurs, les ont annoncés. La faible raison humaine n'a pu percer l'écorce qui couvrait ces pieuses vérités. Il a fallu que tout s'accomplît pour la convaincre. C'est le sens mystique qu'il faut chercher dans les saintes Écritures, ou l'on n'aura jamais l'intelligence de Jérémie, d'Ésaïe, d'Ézéchiel et de Daniel, ni de Barbe-bleue, ni du Cantique des Cantiques. Dès que les deux cavaliers paraissent, voilà la jeune épouse sauvée. Dès que le Messie vient au monde, voilà le diable enchaîné d'éternelles chaînes, voilà la religion chrétienne, toujours militante et toujours triomphante, qui s'établit, et l'ouvrage de notre salut qui s'achève. Mais continuons notre paraphrase. « L'épouse de défunt Barbe-bleue achète une compagnie pour son frère. » Quelle compagnie, si ce n'est le troupeau des fidèles que l'Église contient dans son sein; de ces vrais soldats du Christ, prêts à combattre et à mourir pour la propagation de la vraie foi; de ces soldats prêts à exterminer par le glaive ce nombre d'hérétiques ou plutôt de damnés qui, révoltés contre leur sainte mère, déchirent ses entrailles? Cette compagnie, dans un sens encore plus mystiquement sublime, fait allusion au glaive donné à notre saint-père le pape pour venger la cause de Dieu et exterminer ses ennemis. Continuons encore. « La veuve de Barbe-bleue, ou, pour mieux dire, de Belzébuth, se remarie ensuite à un fort honnête homme. » C'est le pape qu'elle épouse. Comme on sait, l'Église est mariée au pape, qui est le vicaire de Jésus-Christ. Que vienne à présent un Luther, un Calvin, un Socin ou quelque hérétique de leur espèce, tous vrais excréments de l'enfer; qu'on y ajoute un vil ramas de non-conformistes, avec l'infâme séquelle de