<14>Cette multitude immense
Dont nous inondait la France,
Conduite par un Varus,a
Dans sa course triomphante
Trouve, contre son attente,
Un nouvel Arminius.

O nation frivole et vaine!b
Quoi! sont-ce là ces guerriers,
Sous Luxembourg, sous Turenne,
Couverts d'immortels lauriers?
Ceux-là, zélés pour la gloire,
Affrontaient pour la victoire
Les périls et le trépas;
Vous, je vois votre courage
Aussi bouillant au pillage
Que faible dans les combats.

L'intérêt, ce vice infâme,
S'il devient tyran d'un cœur,
Étouffe la noble flamme
De la gloire et de l'honneur.
Français, vantez vos richesses,
Votre luxe, vos mollesses
Et tous les dons de Plutus;
Ma nation, plus frugale,
Aux mœurs de Sardanapale
N'oppose que ses vertus.


a Le comte de Clermont, battu à Créfeld le 23 juin 1758; voyez t. IV, p. 210-212.

b Voyez t. VIII, p. 201-203.