<169>tions que vous y avez faites; j'en ai été charmé. Ces épîtres étaient belles; mais vous y avez ajouté de nouvelles beautés, et surtout quelques transitions qui lient mieux les matières. Ne serait-ce point une faute d'impression que cet endroit de l'Epître de Maurepas que voici :

Il fut cent fois moins fou que ceux dont l'imprudence
Dans d'indignes mortels a mis sa confiance.a

Ne faudrait-il pas ont et leur? Pardon de ces vétilles grammaticales, mais j'aspire au purisme, et je veux m'instruire.

Vous accoutumerez le parterre à tout ce que vous voudrez; des vers de la beauté des vôtres peuvent par leur imposture faire illusion sur le fond des choses. Je suis curieux de voir Oreste, comment vous aurez remplacé Palamède,b et de quelles autres beautés vous aurez enrichi cette tragédie. Si vous pensiez à moi, vous me feriez la galanterie de me l'envoyer; je suis prévenu pour vous, il ne tient donc qu'à vous de recueillir mes applaudissements. Mais se soucie-t-on à Paris que des Vandales et des barbares sifflent ou battent des mains à Berlin?

Cet Éloge de nos officiers tués à la guerre me rappelle une anecdote du feu czar. Pierre Ier se mêlait de pharmacie et de médecine; il donnait des remèdes à ses courtisans malades, et lorsqu'il avait expédié quelque boyard pour l'autre monde, il célébrait ses obsèques avec magnificence, et honorait leur convoi funèbre de sa présence. Je me trouve à l'égard de ces pauvres officiers dans un cas à peu près semblable : des raisons d'État m'obligèrent à les exposer en ces périls où ils ont péri; pouvais-je faire moins que d'orner leurs tombeaux d'épitaphes simples et véritables? Venez au moins corriger ce morceau plein de fautes, pour lequel je m'intéresse plus que pour tous mes


a Œuvres de Voltaire, édit. Beuchot, t. XIII, p. 144.

b Personnage de l'Électre de Crébillon.