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LETTRE I. A JORDAN.

De l'an 1743.

Lorsque tu parles de canons,
Colin doit parler d'astrolabes,
Lise, des courbes, des Newtons,
Et moi, je ferai des chansons
En langues grecques et arabes.
Qu'un chacun garde ses oisons,
Crois-moi, c'est le seul parti sage :
Trop heureux, si nous remplissons
Comme il faut un seul personnage!

Je ne dis point que tu ne sois pas un excellent scribe, un Atlas de bibliothèque, un savant jovial, un terrible Grec, un galant doué de tous les talents que possédait défunt l'âne de Lucien : je me renferme modestement à soutenir que tu n'es point un Bélidora en artillerie. J'ai pensé étouffer de rire en lisant ta lettre. Un tourneur s'offre à faire des canons, et s'adresse à Jordan. Crois-moi, mon ami,


a Bernard Forest de Bélidor, maréchal de camp et inspecteur de l'artillerie à Paris, où il mourut le 8 septembre 1761; il était né en 1697.