<120>Et que sa sœur, bonne et sainte Mitouche,a
L'eut abreuvé d'un bouillon restaurant,
Chacun s'en fut, rempli de ce spectacle,
Et curieux de l'inouï miracle
Qu'opérerait ce pieux charlatan.
Ce jour enfin pour leurs souhaits arrive.
Avant qu'un coq eût chanté le matin,
Des bons parents la troupe fugitive
Vint promptement retrouver leur cousin.
On le revit, hélas! toujours de même,
Roide, immobile et le visage blême;
Le saint revint, et fortement promit
Que, par l'effet de son pouvoir suprême,
On reverrait le mort sortir du lit;
Sur quoi d'abord nouveaux bouillons on fit.
Enfin, depuis, huit jours on attendit;
Point de miracle; on attend le quinzième;
En espérant on va jusqu'au vingtième;
Mais pas un mot que le bon saint leur dit,
Pour le malheur du mort, ne s'accomplit.
Et quelle fut l'abattement énorme,
Lorsque, voulant juger du fait en forme,
Jusques au fond le cas s'approfondit!
Quelqu'un du mort leva la couverture;
Ciel! il sentit .... fais-en la conjecture,
Ami lecteur; je sais que tu m'entends,
Et volontiers de cette idée impure


a Sainte Mitouche est un personnage de la Pucelle de Voltaire (V, 21), qui a mis sous le texte la note suivante : « On disait autrefois sainte n'y touche, et on disait bien. On voit aisément que c'est une femme qui a l'air de n'y pas toucher; c'est par corruption qu'on dit sainte Mitouche. » L'expression usitée aujourd'hui est sainte nitouche.